« Quant à la mort, elle n’implique aucune positivité d’aucune
sorte[1] »,
montre Jankélévitch : pour Rousseau au contraire, la mort se voit attitrée
de la plus grande positivité qui soit ; elle est ce qui ouvre, mais elle est aussi et surtout ce
qui achève, le geste de la clôture
étant essentiel dans la mesure où l’existence réclame, pour se constituer en
essence, la mort non comme son antithèse ou son empêchement[2]
mais comme la possibilité même de se réaliser. Rousseau joint à une conception
négative de la mort telle qu’il la présente dans l’Emile, une approche qui considère cette dernière comme condition de
possibilité pour la vie même et non au-delà d’elle. Dans l’Emile, la mort est ainsi envisagée comme
la fin des misères et ce qui dédommage du triste présent que serait l’existence :
« Si nous étions immortels nous
serions des êtres très misérables. Il est dur de mourir sans doute mais il est
doux d’espérer qu’on ne vivra pas toujours et qu’une meilleure vie finira les
peines de celle-ci. Si l’on nous offrait l’immortalité sur la terre, il n’y a
pas un homme qui voulut accepter ce triste présent. Quelle ressource, quel
espoir, quelle consolation nous resterait-il contre les rigueurs du sort et
contre les injustices des hommes ? On a rarement le droit de se donner la
mort mais il est souvent ordonné de l’aller chercher et très souvent permis de
l’attendre. Si l’on n’était pas sûr de mourir une fois la vie coûterait trop à conserver ; mais
aussitôt qu’elle est un vrai mal elle
n’est plus un mal nécessaire puisque le
mal qui la termine est inévitable
et qu’en guérissant l’autre il peut devenir un bien[3] ».
L’existence soumise aux rigueurs impitoyables du sort est
susceptible de devenir un vrai mal,
c'est-à-dire un mal absolu qui ne peut être compensé que par son caractère
fini : la mort apparaît comme ce qui guérit par cela même qu’il achève.
La seconde approche qui ne voit plus en la mort la seule fonction
de terminer lui confère l’office de
la limite qui par la définition qu’elle permet de l’existence, lui octroie la
seule chose qui lui manquait irrémédiablement, c'est-à-dire la clôture. L’analyse
de la Lettre à Voltaire qui se fait
encore en 1756 au conditionnel[4]
est confirmée, et l’existence consiste dans un bien inaliénable dont il n’est
nécessaire de compenser aucun mal. La mort et la pensée de la mort ne
constituent pas tant une consolation réparatrice qu’une condition positive pour
faire de la vie le dédommagement même.
Sans la fiction d’une mort qui permet de convertir l’instant
heureux en une éternité qui n’est plus jamais susceptible d’être interrompue
(sinon par cette mort même qui, loin d’être une interruption négatrice, est un
pouvoir affirmateur de ce qui la précède), Rousseau serait resté dans la
situation de Julie telle qu’il la dépeint dans la troisième partie de la Nouvelle Héloïse :
« Enfin le voile est déchiré ;
cet espoir si doux s’est éteint ; il ne me reste pour aliment d’une flamme
éternelle qu’un souvenir amer et délicieux qui soutient ma vie et nourrit mes tourments
d’un vain sentiment d’un bonheur qui n’est plus. Est-il donc vrai que j’ai
goûté la félicité suprême ? suis-je
bien le même être qui fut heureux un jour ? […] Jours de plaisirs et
de gloire, non, vous n’étiez pas d’un mortel ! vous étiez trop beaux pour
devoir être périssables […].
Hélas ! vous avez disparu comme un éclair ! Cette éternité de bonheur ne fut qu’un instant de ma vie[5] ».
Cette lettre de Julie montre que l’identité n’a pas pour seule
condition la mémoire, puisque c'est précisément le souvenir qui émiette le moi
par la désolidarisation qui se fait jour entre l’objet du souvenir et le temps
présent. On pourrait considérer que ce bonheur goûté par Julie n’appartient
qu’au domaine des plaisirs dont la vivacité sacrifie à la durée dont Rousseau
regrette que la vie n’en soit que parsemée[6]
sans pourtant attribuer à ces points fugitifs le statut du vrai bonheur. Ce
moment délicieux bien que non pérenne se réduirait alors, selon le mot de G.
Poulet, à une « fausse intemporalité obtenue par une sorte de
multiplication des mouvements de l’âme sous l’empire de la passion[7] ».
Mais la distinction qui est ici opérante n’est pas tant celle qui oppose les
plaisirs clairsemés au bonheur comme état permanent, que celle qui sépare deux
points de vue sur l’identité : le texte de Julie témoigne d’une identité
disloquée et d’une existence faite d’une succession plutôt que d’une continuité[8] ;
au lieu que les Rêveries permettent
de ressaisir l’identité du sujet dans l’unité, sans que la mémoire soit
nécessairement mise à contribution.
Par le désir de terminer ses jours dans son île, Rousseau
transforme rétrospectivement et prospectivement son existence :
l’expérience du lac de Bienne se voit non seulement purifiée mais convertie, et
la durée dont la rêverie de la rive est le point de commencement se voit
continuée jusqu’au seuil de la vie, jusqu’à la mort même, ce qui ne permet plus
de distinguer le bonheur terrestre du bonheur ultra-terrestre, puisque tous
deux closent définitivement l’existence[9],
le premier n’étant plus menacé par le sentiment des maux qui peuvent à tout
moment interrompre la jouissance. Est conquis un état continu et permanent dont
l’horizon de la mort constitue la parfaite clôture sur soi-même, et non le
point de passage vers un autre état (dont la fonction serait purement
négative : contre la vie sur
terre, annoncer et accorder une existence en tous points contraire à la
première).
L’hypothèse d’une autre mort fait l’économie de toutes les
circonstances extérieures qui l’empêchent. Le désir dont fait l’objet la
fiction a supposé l’anéantissement de toutes les craintes relatives à ce qui ne
dépend pas du promeneur solitaire, comme le contraste des Confessions permet de l’éclairer : « Ah c'est peu qu’on me permette d’y vivre je voudrais qu’on m’y condamnât et je voudrais être contraint d’y rester pour ne l’être pas
d’en sortir[10] ».
La fiction se recentre désormais sur la seule projection indépendamment des
obstacles, au lieu que le passage des Confessions
ne considérait le désir qu’à la lumière des vicissitudes et contrariétés qui le
contraignent de n’être qu’un vœu pieux. En somme le Rousseau des Rêveries est-il parvenu à conquérir par
lui-même, i.e. dans la fiction, le sort
du prisonnier dont il fait l’objet vain de son espérance dans les Confessions :
« Je jetais un œil d’envie sur
l’heureux Micheli Du Cret qui tranquille au Château d’Arberg n’avait eu qu’à
vouloir être heureux pour l’être[11] ».
La fiction permet de substituer à un bonheur dont les conditions
sont presque exclusivement externes (la condamnation par les autres à demeurer
dans sa prison perpétuelle[12]),
une félicité dont la ressource est purement intérieure : l’asile du
souvenir purifié et de l’imagination se soustrait à toutes les manœuvres qui ne
dépendent pas de soi.
Si nous nous rendus maintenant attentifs à la structure des deux
textes qui relatent le séjour sur l’île Saint-Pierre, nous nous apercevons que
là où les Confessions ne permettaient
pas de dissocier entre le bonheur et l’inquiétude, la Cinquième Promenade isole
la considération du bonheur de tout ce qui l’offusque. Ainsi le bonheur au
livre XII des Confessions est-il
plutôt signalé par ce qui l’empêche que par ce qui le permet. Rousseau le définit
négativement ou du moins apparait-il en contrepoint de ce qu’il n’est pas,
comme en témoignent les syntagmes tels que ceux du retranchement ou de la
sortie : « Un jour à passer hors de l’Île me paraissait retranché de
mon bonheur, et sortir de l’enceinte de ce lac était pour moi sortir de mon
élément[13] ».
La jouissance de l’état se heurte à une espérance négative. Le désir n’est pas
tant celui d’une perpétuation que celui de la non-interruption :
« l’ardent désir de finir mes jours dans cette Île était inséparable de la
crainte d’être forcé d’en sortir[14] ».
L’inquiétude n’est pas dans ce qui précède ou succède la jouissance mais elle
l’habite :
« Ce repos dont je jouissais avec
passion n’était troublé que par l’inquiétude de le perdre, mais cette inquiétude
allait au point d’en altérer la douceur[15] ».
L’immanence de la crainte dans le plaisir constitue un obstacle
interne à sa conversion en état, et c'est jusqu’au désir que l’instant soit
durable qui se voit anéanti :
« Je sentais ma situation si précaire
que je n’osais y compter […]. Ceux qui ne font que [me souffrir ici] peuvent à
chaque instant m’en chasser et puis-je espérer que mes persécuteurs m’y voyant
heureux m’y laissent continuer de l’être[16] ».
La description de la rêverie elle-même est habitée par les
méchants qui, s’ils ne sont signalés que par leur absence, n’en demeurent pas
moins présents négativement :
« Le moment où je dérivais me donnait
une joie qui allait jusqu’au tressaillement et dont il m’est impossible de dire
ni de bien comprendre la cause, si ce n’était peut-être une félicitation
secrète d’être en cet état hors de
l’atteinte des méchants. J’errais ensuite seul dans ce lac approchant quelquefois du rivage, mais n’y abordant jamais. Souvent laissant aller
mon bateau à la merci de l’air et de l’eau je me livrais à des rêveries sans
objet et qui pour être stupides n’en étaient pas moins douces. Je m’écriais
parfois avec attendrissement : ô nature, ô ma mère, me voici sous ta seule
garde : il n’y a point ici d’homme
adroit et fourbe qui s’interpose entre toi et moi[17]
[…] ».
Au contraire, la description de la rêverie dans la Cinquième
Promenade fait abstraction de tout ce qui pourrait déranger celle-ci pour se
concentrer sur la seule positivité de l’expérience, indépendamment de ses
conditions négatives (la solitude, la circonscription, l’absence des autres
hommes). Si les obstacles peuvent faire irruption, comme la réflexion sur les
vicissitudes de ce monde, leur anéantissement est sitôt constaté :
« De temps à autre naissait quelque
faible et courte réflexion sur l’instabilité des choses de ce monde dont la
surface des eaux m’offrait l’image : mais bientôt ces impressions légères
s’effaçaient dans l’uniformité du mouvement continu qui me berçait[18] ».
La figure du bonheur du sage maintenu dans les bornes de sa place
et sous le joug de la nécessité, tenant en équilibre son pouvoir et son désir,
est rigoureusement dépendante de la deuxième, laquelle par la jouissance de
l’anticipation imaginaire transporte le juste dans l’empirée divin. Il serait
impossible à Emile d’être heureux en dépit des rigueurs du sort et des affronts
des méchants, s’il n’était persuadé que « la mort est la fin de la vie du
méchant et le commencement de celle du juste[19] ».
En revanche, la troisième figure du bonheur ne doit rien aux deux
premières : tandis que l’adhérence au moment présent ne constituait qu’une
jouissance négative dont la conversion en vrai bonheur dépendait d’un transport
dans l’avenir, cette fois le rapport à l’instant est vécu d’une toute autre manière
qui permet que les bornes de la condition ne soient plus des frontières au-delà
desquelles il sera nécessaire de déplacer, mais bien des limites constitutives
qui confèrent à l’être sa définition. Pour que cette troisième approche du
bonheur soit possible, il fallait que la dichotomie entre le plaisir et le
bonheur ne soit plus tributaire de l’opposition entre l’instant et le temps. La
simplicité et la permanence de l’état peut désormais être connue dans
l’instant, étant entendu que la jouissance du présent peut - lorsque les
conditions sont réunies[20]
- n’être plus appréhendée sous le mode de la fugitivité mais sous celui, sinon
de l’éternité, du moins d’une certaine durée victorieuse des entrecoupements et
des ruptures qui étaient jusqu’alors le lot du sujet. C'est donc aussi un
certain rapport au temps qui permet qu’à une projection dans le futur de l’âme
détachée de toute temporalité terrestre soit préférée la conquête d’un bonheur
dans l’instant. La distinction entre bonheur et plaisir est reconduite à une
unité, la jouissance n’étant plus menacée par l’irruption du malheur. Le temps
était aperçu dans ses attributs négatifs (les ruptures et saccades qu’il
infligeait à une destinée incertaine) ; l’accident de Ménilmontant a
permis qu’il soit dompté par la mise au jour d’un projet divin, d’une
Providence qui en règle le cours et en justifie les aléas. Il n’est désormais
plus nécessaire de légitimer les rigueurs que la temporalité inflige au sujet.
La mémoire et l’imagination permettent que le moment heureux, même
s’il n’a pas duré aussi longtemps que la vie même, rejaillisse sur le présent
de l’existence et dédommage l’individu du destin le plus terrible :
évoquant le bonheur des Charmettes avec Maman, Rousseau écrit dans la dernière
Promenade que « dans l’espace de quatre ou cinq ans [il a] joui d’un
siècle de vie et d’un bonheur pur et plein qui couvre de son charme tout ce que
mon sort présent a d’affreux[21] ».
Quand bien même ces deux facultés seraient stupéfaites, ou plutôt grâce à la
stupéfaction de celles-ci – la mémoire et l’imagination n’étant pas seulement
rémunératrices, mais sont aussi la cause des tourments et l’artisan de nos maux[22]
- le bonheur demeure possible : la
valeur absolue conférée à l’instant heureux l’éternise.
[1]
Jankélévitch, La mort, Paris,
Flammarion, 1996, p.407.
[2] « Le
vivant est aux prises avec la stérile et mortelle antithèse et se défend
désespérément contre le non-être ; la mort est le pur, l’absolu
empêchement de se réaliser », Jankélévitch, La mort, p.407.
[3] Emile (Manuscrit Favre), OC IV, p.85.
[4] « S’il
est mieux pour nous d’être que de n’être pas, c'en serait assez pour justifier notre existence, quand même nous
n’aurions aucun dédommagement à attendre des maux que nous avons à souffrir, et
que ces maux seraient aussi grands que vous les dépeignez », Lettre à Voltaire
du 18 août 1756, Lettres philosophiques,
op.cit., p.96.
[5] La Nouvelle Héloïse, Troisième Partie,
Lettre VI, OC II, p.317.
[6]
« Ces courts moments de délire et de passion, quelque vifs qu’ils puissent
être ne sont cependant et par leur vivacité même, que des points bien
clairsemés dans la ligne de la vie. Ils sont trop rares et trop rapides pour
constituer un état, et le bonheur que mon cœur regrette n’est point composé
d’instants fugitifs mais un état simple et permanent, qui n’a rien de vif en lui-même,
mais dont la durée accroît le charme au point d’y trouver la suprême
félicité », Les Rêveries du
promeneur solitaire, Cinquième Promenade, OC I, p.1046.
[7] G.
Poulet, Etudes sur le temps humain,
éditions du Rocher, Paris, 1952, p.217.
[8] La durée
est alors comprise à la manière lockéenne : « La durée et le temps
qui en est un élément, est l’idée que nous avons de la distance évanescente
dont deux éléments ne coexistent jamais,
mais se succèdent : comme
l’expansion est l’idée d’une distance permanente dont tous les éléments
existent ensemble et ne peuvent se succéder », Essai sur l’entendement humain, Livre II, Chapitre 15, §12
« Deux éléments de durée n’existent jamais ensemble, ceux de l’expansion
existent tous ensemble », Vrin, Paris, 2001, p.326. Locke exclut que
l’existence puisse être continue : elle ne peut être que successive.
[9] Rappelons que le vicaire savoyard ne postule pas
l’immortalité de l’âme, mais sa simple persistance après la mort du corps de
telle sorte qu’elle puisse jour de l’ordre dont elle a été privée pendant la
vie : « Mais quelle est cette vie, et l’âme est-elle immortelle par
sa nature ? Mon entendement borné ne conçoit rien sans bornes ; tout
ce qu’on appelle infini m’échappe. Que puis-je nier, affirmer, quels
raisonnements puis-je faire sur ce que je ne puis concevoir ? Je crois que
l’âme survit au corps assez pour le maintien de l’ordre ; qui sait si
c'est assez pour durer toujours ? ». Le vicaire présume certes que
l’âme ne mourra pas :« Je conçois comment le corps s’use et se détruit
par la division des parties, mais je ne puis concevoir une destruction pareille
de l’être pensant, et n’imaginant point comment il peut mourir, je présume
qu’il ne meurt point ». Toutefois il faut comprendre que ce postulat de
l’éternité de la vie de l’âme, s’il dépasse les bornes de la raison qui ne
conçoit rien que de limité, est également en surplus par rapport à ce que
prononce le sentiment intérieur : il faut et il suffit que l’âme survive assez pour le maintien de l’ordre.
[10] Les Confessions,
livre XII, OC I, p.646.
[11] Les Confessions,
livre XII, OC I, p.646. Micheli du Cret était prisonnier d’état, jugé coupable
de crime de lèse-majesté en 1731 et condamné par contumace à la prison
perpétuelle pour s’être opposé à un projet de modification des fortifications
de la ville de Genève.
[12] « Enfin à force de me livrer à ces réflexions et aux
pressentiments inquiétants des nouveaux orages toujours prêts à fondre sur moi,
j’en vins à désirer, mais avec une ardeur incroyable, qu’au lieu de tolérer
seulement mon habitation dans cette Île, on me la donnât pour prison
perpétuelle, et je puis jurer que s’il n’eût tenu qu’à moi de m’y faire
condamner, je l’aurais fait avec la plus grande joie, préférant mille fois la
nécessité d’y passer le reste de ma vie au danger d’en être expulsé », Les Confessions, livre XII, OC I, p.646.
[13] Les Confessions,
livre XII, OC I, p.645.
[14] Les Confessions,
livre XII, OC I, p.645.
[15] Les Confessions,
livre XII, OC I, p.645.
[16] Les Confessions,
livre XII, OC I, pages 645-646.
[17] Les Confessions,
livre XII, OC I, pages 643-644.
[18] Les Rêveries du
promeneur solitaire, Cinquième Promenade, p.1045.
[19] Emile, Livre V,
OC IV, p.820.
[20] « Il est vrai que ces dédommagements ne peuvent être
sentis par toutes les âmes ni dans toutes les situations », Les Rêveries du promeneur solitaire,
Cinquième Promenade, OC I, p.1047.
[21] Les Rêveries du
promeneur solitaire, Dixième Promenade, OC I, p.1099.
[22] La mémoire est une boite de Pandore qui rappelle au
vieillard, jusque dans la situation la plus misérable, les souvenirs douloureux
qui brisent la continuité son affection ; quant à l’imagination, elle le
met en avant de lui-même en lui faisant espérer des biens qui ne seront
peut-être pas. Dans son article, C. Van Staen traite du statut de la mémoire, partagée
entre bourreau et remède, qui déjà dans les Confessions
doit faire l’exercice d’une purification, d’un tri par l’écriture :
« Ne point laisser le pire dominer sa mémoire : c'est le choix que
tout individu confronté à la tragique fuite du temps se doit de poser s’il
aspire encore à quelque frêle bonheur » (C. Van Staen, « Les sourires crépusculaires de Jean-Jacques
Rousseau », Etudes Jean-Jacques
Rousseau, numéro 13, 2002, p.250. Dans la première lettre à Malesherbes,
Rousseau désigne l’imagination comme la cause de l’agitation :
« Cette agitation n’a point son principe dans ma situation actuelle mais
dans une imagination déréglée, prête à s’effaroucher sur tout et à porter tout
à l’extrême » (Lettres à Malesherbes,
Première lettre du 4 janvier 1762, OC I, p.1131).
Aucun commentaire:
Publier un commentaire